+150% de clients en 3 ans et une augmentation de l'équipe CSM de seulement 25%, cela demande des process ultra-optimisés au sein desquels les Playbooks jouent une place centrale. Voici le retour d'expérience d'Anne, Head of Customer Success chez Karnott.
Peux-tu nous présenter Karnott et ton rôle au sein de la société ?
Karnott est une solution qui permet un suivi automatisé des travaux agricoles et viticoles. Nos utilisateurs peuvent ainsi optimiser en temps réel l’utilisation de leurs matériels et contrôler leurs interventions.
Je suis arrivée il y a un peu plus de 4 ans maintenant, en tant que Customer Success Manager. Nous avions environ 150 clients, formés sur le tas. Et une seule personne pour gérer le support, les commandes, la facturation, l’onboarding et le SAV. J’ai donc pris à cœur de mettre de l’ordre dans tout ça, et assez rapidement nos deux fondateurs m’ont proposé de créer le département Customer Success. Nous avons accueilli 3 nouveaux CSM et s’en est suivi une période de structuration, de mise en place de nouveaux outils, de qualification de la donnée et d’aide au support.
Nous sommes passés de 700 clients fin 2019 à 1700 clients aujourd’hui, et nous avons agrandi l’équipe d’un quatrième CSM en septembre 2020.
J’imagine que la question de la segmentation du portefeuille s’est rapidement posée. Comment as-tu abordé le sujet ?
Notre force de vente est répartie en zones géographiques. C’est donc tout naturellement que la segmentation du portefeuille s’est faite dans un premier temps uniquement sur la base de cette répartition. Chaque CSM était donc responsable de plusieurs départements, composés de tout type de clients. Et donc cela signifiait que le commercial avait un expert Karnott référent. Cette segmentation a bien fonctionné mais n’était évidemment pas optimale.
Pas optimale en termes de quantité, certaines zones étant plus florissantes que d’autres. J’ai commencé à avoir de gros déséquilibres de portefeuille entre CSM. Et pas optimale en termes de valeur ajoutée, n’ayant considéré aucun niveau de potentiel, d’implication, de besoin ou encore de satisfaction client.
J’ai donc repensé cette répartition il y a quelques mois avec l’équipe. Nous prenons désormais en compte plusieurs dimensions, qui permettent une segmentation par tiers une fois l’onboarding terminé :
- la typologie du client
- le nombre d’équipements
- le MRR
- le potentiel d’upsell et de cross-sell
- le niveau d’implication
Comment as-tu structuré l’équipe par rapport à cette segmentation ?
Tout s’est accéléré l’été dernier ! Notamment avec l’envie de faire évoluer notre système tarifaire, en proposant désormais 3 formules (et donc sous-entendu 3 types d’accompagnement) et la volonté de spécialisation des CSM.
A noter également que chez Karnott la saisonnalité est assez marquée, que nous avons une clientèle travaillant 24h/24 et 7j/7 et que la solution ne peut pas fonctionner sans la partie hardware (les matériels sont équipés de compteurs connectés qui nécessitent un positionnement adéquat). La phase d’onboarding est donc primordiale, et parfois longue. Sans oublier que nous avons des typologies de clients parfois très différentes, allant du gros industriel au petit exploitant agricole, et donc qui ne demandent pas le même investissement (subtil mélange de low touch, mid touch et high touch).
Il faut donc composer avec tout ça, et essayer de trouver l’organisation la plus optimale et la plus scalable possible, sans pour autant embaucher plus.
Nous avons donc fait le choix d’avoir :
- une CSM spécialiste de l’onboarding qui gère l’ensemble des nouveaux clients, hors grands comptes ;
- deux CSM en relais sur les phases d’adoption et d’expansion qui se répartissent les clients en fonction de leurs typologies, hors grands comptes ;
- une CSM spécialiste des grands comptes qui les accompagne dès l’onboarding et qui est également la référente des remontées clients auprès de l’équipe produit.
Ce modèle nous a permis de bien redéfinir notre Customer Journey, et surtout de pouvoir écrire des parcours toujours plus personnalisés.
A quel moment as-tu pris conscience du besoin d’automatiser tes parcours client ?
En toute honnêteté, assez rapidement. Encore une fois, nous travaillons avec une clientèle peu disponible. Il n’est pas toujours facile de les avoir au téléphone, ou en tout cas, au moment où nous, nous travaillons. Le facteur météo joue aussi énormément, et ça personne ne le maîtrise ! C’est donc à nous de nous adapter. A nous de proposer différents types d’accompagnement, et plus uniquement via le canal téléphonique.
Parallèlement à cela, tu as forcément la question de la quantité qui se pose. Tu ne peux plus appeler tout le monde, tout le temps. Surtout quand tu dois gérer 600 clients tout seul et que tu veux fournir un accompagnement de qualité. Il a donc fallu bousculer un peu les habitudes du début, prouver que l’accompagnement peut être tout aussi qualitatif via d’autres canaux (historiquement tous les onboardings se faisaient forcément par téléphone), identifier les étapes pour lesquelles le CSM a de la valeur ajoutée et commencer à digitaliser les parcours.
Pour parler plus concrètement, même si tu prends rapidement conscience du besoin d’automatiser, ça ne se fait pas en quelques jours. Il faut avoir un parcours de base suffisamment clair, et surtout des données à exploiter. Si tu n’as pas de data clients, tu ne pourras pas faire grand chose. Et c’est à ce moment-là que tu peux envisager tes parcours automatisés. Les premiers ont été effectifs environ 6 mois après la création du service.
Quels sont tes principaux leviers pour automatiser les parcours client ?
L'introduction d’une Customer Success Platform, en complément de notre CRM, nous a permis d’avoir une vue 360 de nos clients, aussi bien en termes de données brutes que de données comportementales. Tu n’es plus seulement réactif, tu deviens proactif !
L’outil pense pour toi, et une fois que tout est bien configuré, c’est puissant !
C’est donc grâce à cet outil que j’ai pu activer LE levier d’automatisation : les Playbooks. On les utilise de 4 manières :
- comme séquences d’emails automatisés : le client reçoit le bon email personnalisé en fonction de là où il en est dans son cycle de vie
- comme remontée d'informations (nouveau client, nouveau feedback, nouveau promoteur, mise en route autonome...) : le CSM n’a rien à faire, juste prendre connaissance de l’information sans avoir à la chercher
- comme tâche à effectuer (nouvel onboarding, nouveau bilan...) : il s’agit des points de contact à faire, directement liés au cycle de vie du client
- comme alerte (nouvelle opportunité d’upsell, mauvaise santé...) : le système détecte un comportement, au CSM d’agir ou non en fonction du contexte client.
Et petit bonus : comme rappel pour qualifier de la data (usage un peu détourné, mais pourquoi s’en priver ?). A ce jour, nous avons environ 80 Playbooks actifs car nous personnalisons énormément nos parcours. Le tout est de faire attention à les déclencher aux moments les plus opportuns pour éviter de tomber dans la surenchère et perdre l’effet priorisation.
Les Playbooks peuvent avoir un côté très figé, impersonnel. Comment gérez-vous cela ?
Je me répète mais le travail sur la data est primordial. Plus on a d’informations sur nos clients, plus on peut personnaliser nos communications automatiques et gommer cet effet impersonnel. C’est ça qui nous permet d’avoir des parcours personnalisés en fonction de la typologie du client, son plan, son activité, son cycle de vie, son comportement, son rôle au sein de la structure…
Pour éviter d’avoir cet effet “robot”, on a mis en place plusieurs choses :
- déjà, chaque email est rédigé comme si c’était le coach attitré qui écrivait : on se présente, on emploie le “je”, on signe avec son portable pro, on emploie un ton qui ne se veut pas trop formel et on met un peu d’émojis (on aime beaucoup les émojis dans mon équipe 😃)
- on propose toujours plusieurs schémas de formation pour montrer qu’on s’adapte au quotidien et au rythme soutenu de travail de nos clients, on leur laisse toujours le choix : on va favoriser la formation autonome en mettant à disposition les bonnes ressources au bon moment, on va proposer des créneaux de formations groupées pour bénéficier de l’expérience des autres utilisateurs et on se rend toujours disponible pour des formations individualisées
- on essaie aussi au maximum de responsabiliser nos clients : on ne souhaite pas être trop insistant et “bombarder” de mails, on se veut donc très concret et on va droit au but.
Et le gros atout de ces derniers mois, c’est l’introduction de contenus vidéos. On propose à la fois des tutoriels de formation mais aussi des vidéos “tips” sur des points bien précis. Le retour sur investissement a été ultra rapide : le nombre de formations autonomes a explosé, les onboardings sont plus qualitatifs, les clients peuvent rapidement se plonger au cœur des applications web et mobile, et nous on s’éclate à tourner ces vidéos !
Je suis tout simplement devenue fan de Loom (on peut ajouter sa tête dans une bulle en même temps que de filmer son écran, ça permet de mettre un visage sur une voix) et PlayPlay, qui permet un montage à la fois professionnel et ludique.
Quel est le process pour définir un nouveau parcours avant d’industrialiser, puis pour améliorer l’existant ?
Il faut expérimenter ! Et ne pas juste se fier à ses intuitions ou ses convictions. On peut parfois avoir des certitudes, et finalement la réalité est tout autre. Par exemple, on dit souvent que les agriculteurs ne lisent pas leurs mails. Les taux d’ouverture démontrent le contraire. On a longtemps hésité à proposer des webinars en se disant que le nombre d’inscrits serait très faible, et finalement on a de fidèles acolytes et les échanges sont supers !
Au-delà d’expérimenter, il faut aussi mesurer. Les outils que l’on utilise nous permettent d’avoir des analyses assez poussées de ce qu’on le fait, à nous de nous en servir à bon escient ! Et surtout être patient :) On tire parfois des conclusions trop rapidement. On le sait, notre activité est fortement marquée par la saisonnalité et le peu de dispos de nos clients à certains moments, il faut donc laisser le temps à ces “stratégies” de faire leur effet.
Pour compléter, on interroge aussi beaucoup nos clients directement. Il n’est pas toujours évident d’avoir des feedbacks écrits, alors on profite des rendez-vous téléphoniques pour prendre la température sur certains sujets. Et bien sûr, on se nourrit aussi des retours terrain de notre force de vente.
A titre plus personnel, je fais énormément de veille. Articles de blog (ceux de Skalin sont tops ;)), podcasts, Linkedin, échanges avec des homologues… J’adore voir ce qui se fait ailleurs, le tester et l’adapter à notre activité. Si ça fonctionne, tant mieux. Sinon, on réajuste !
Est-ce que vous avez aussi déployé des solutions pour accompagner vos utilisateurs au sein de votre Produit ?
Tout à fait ! On essaie d'interagir de plus en plus avec nos utilisateurs au sein du produit, car l’effet est forcément plus rapide qu’un mail et on est sûr que le client ne passe pas à côté de l’information.
En fonction du message que l’on souhaite faire passer, on a déployé plusieurs leviers :
- les Product Tour, qui guident les clients dans la configuration de leur compte ou la découverte d’une nouvelle feature. Ils ont le mérite d’être très pratico-pratiques forcément mais le décrochage est assez élevé chez nous. On mise donc davantage aujourd’hui sur les tutoriels vidéos
- les bannières, utiles pour de l’information courte (maintenance, nouveau webinar, nouveau podcast, nouvelle offre promotionnelle…)
- les posts, sorte de pop-up utiles pour de l’information qui nécessite un peu plus de détails
- les Mobile Carousel, tutoriels pour l’application mobile ultra interactifs et qui cartonnent chez nous.
Nous utilisons Intercom pour mettre en place tout ça, l’avantage c’est que l’on est autonome dans le déploiement, que le client peut réagir avec des émojis et que l’outil nous permet de mesurer leur efficacité. Nous sollicitons tout de même notre super équipe produit pour intégrer des liens FAQ à des endroits stratégiques afin d’améliorer toujours plus l’expérience utilisateur !
Pour aller plus loin :
- Comment utiliser les Playbooks pour scaler son Customer Success ?
- Pitchy : comment scaler ses opérations de Customer Success ?
- Data Impact : Pourquoi et comment déployer une CS Platform ?
- Fasterize : scaler son onboarding grâce aux Playbooks
- Vertuoza : automatiser ses parcours clients pour gérer son hypercroissance
- Les meilleures Customer Success Platform selon Capterra et G2